Et s’il était bientôt possible de diagnostiquer précocement un trouble bipolaire chez un patient afin de le traiter efficacement et le plus rapidement possible ? C’est ce que suggèrent des chercheurs danois après avoir identifié des facteurs de risque génétiques du trouble bipolaire et de psychoses chez des personnes souffrant de dépression. Zoom sur les conclusions de cette étude publiée dans l’American Journal of Psychiatry.
Bipolarité : un diagnostic souvent tardif
On estime que 1 à 2,5 % des français souffrent de troubles bipolaires. Cette pathologie psychiatrique figure parmi les plus graves et se caractérise par des variations disproportionnées de l’humeur. De ce fait, l’impact est important sur la qualité de vie du patient au quotidien.
Difficile à diagnostiquer, cette pathologie est facilement confondue avec la dépression, les troubles anxieux, voire les troubles de la personnalité. Dans un certain nombre de cas, le diagnostic d’un trouble bipolaire peut donc être posé pour la première fois plusieurs années après que la pathologie ait débuté ! Or, ce diagnostic tardif est associé à un pronostic défavorable pour l’évolution de la maladie.
À savoir ! Si elle n’est pas correctement prise en charge, cette maladie peut conduire à un risque élevé de suicide, de troubles psychiatriques et de désinsertion familiale et sociale.
Les scientifiques s’accordent donc à dire que plus tôt le patient obtient le bon diagnostic et commence un traitement thérapeutique ciblé, meilleur sera le pronostic. D’où l’importance pour les chercheurs d’identifier les facteurs de risque qui aideront les psychiatres à établir le bon diagnostic le plus tôt possible. Dans ce contexte, une équipe de scientifiques danois a cherché à savoir si des facteurs génétiques étaient associés à un risque accru de développer un trouble bipolaire ou une psychose.
Des facteurs de risque génétiques chez les patients dépressifs
Partie intégrante du projet de psychiatrie danois iPSYCH, cette nouvelle étude a été l’occasion pour les chercheurs de découvrir que la dépression précède souvent le trouble bipolaire et les psychoses. Il se trouve en effet que de nombreux patients ayant développé un trouble bipolaire ou des psychoses ont initialement souffert de dépression.
L’équipe de chercheurs a donc entrepris de déterminer si des facteurs génétiques étaient associés à un risque accru de développer un trouble bipolaire ou une psychose chez les patients souffrant de dépression. Pour mener à bien leurs recherches, les scientifiques ont ainsi examiné les données de 16 949 personnes âgées de 10 à 35 ans qui avaient été traitées pour dépression dans un hôpital psychiatrique au Danemark entre 1994 à 2016. Parmi les facteurs examinés : les scores de risque génétique pour le trouble bipolaire et la schizophrénie.
À savoir ! Le score de risque génétique désigne le risque génétique individuel d’une personne de développer un certain trouble.
Les scientifiques ont alors pu constater que le score de risque génétique pour le trouble bipolaire était associé à un risque accru de développer un trouble bipolaire (et que le score de risque génétique pour la schizophrénie était associé à un risque accru de développer une psychose) chez les patients ayant reçu un diagnostic de dépression. Ces scores pourraient donc éventuellement aider les psychiatres à déterminer lequel de leurs patients souffrant de dépression est le plus à risque de développer par la suite un trouble bipolaire ou une psychose.
Vers un diagnostic plus précoce des troubles bipolaires ?
Ces observations laissent supposer qu’à terme, l’examen des facteurs de risques génétiques pourrait aider à identifier en pratique les patients nécessitant une surveillance encore plus étroite. Néanmoins, d’après l’un des membres du groupe de recherche auteur de l’étude : « À l’heure actuelle, les scores de risque génétique ne peuvent pas contribuer au diagnostic précoce du trouble bipolaire et des psychoses en pratique clinique, mais il ne peut être exclu que cela puisse être le scénario futur. »
Par ailleurs, pour l’équipe de chercheurs, les antécédents familiaux de troubles bipolaires ou de psychoses prédisposent au développement de ces troubles après un épisode dépressif. D’où l’importance capitale de récolter rapidement des informations sur la présence éventuelle de troubles mentaux dans l’entourage familial lors de la prise en charge des personnes souffrant de dépression.
Déborah L., Docteur en Pharmacie
– Trouble bipolaire : repérage et prise en charge initiale. has-sante.fr. Consulté le 7 juillet 2021.